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vous êtes à : publication récentes DE J.Demorgon / 2016, juin. IRIS n°37 : « L’entre-deux redoublé entre le cosmos et l’humain ou l’intérité cachée »



2016, septembre. Phaéton 2, Bordeaux. Article de J.D. « L’homme antagoniste (L’universalisant laïque) »


Présentation de l’article de J. D. « L’homme antagoniste (L’universalisant laïque) »

1./ Entre histoire, anthropologie et avenir, le fil rouge laïque
a./ La laïcité serait une affaire française. Opinion reprise encore à un colloque du Gerflint réunissant les équipes rédactionnelles de ses trente-quatre revues Synergies « Pays » et « Monde ». Thème partagé : « Les Enjeux de la Laïcité. A l’ère de la diversité culturelle planétaire » (Cortès : 2014). Sadek Aouadi, Urbain Amoa, Abdennour Bidar souhaitèrent une laïcité « compréhensive, explicative » de l’histoire politique et religieuse de chaque pays. A un autre moment, une polémique fit irruption entre Michel Wieviorka et Henri Pena-Ruiz sur la question de la relation trop peu pensée entre économie financière informationnelle mondiale et laïcité. Enfin, à l’issue du colloque, des voix italiennes et britanniques unies en rallièrent d’autres pour qualifier la laïcité d’exception française. Stupeur de certains participants dont nombre de Français.
b./ Gardons en mémoire ces trois questions à l’origine du travail qui suit. Elles nous ont paru solliciter l’histoire planétaire globale et l’anthropologie profonde, prix à payer pour un changement radical de perspectives. La laïcité commence à découvrir ses racines immémoriales depuis que, selon Patrick Boucheron (2016 :71), on commence à « comprendre que l’histoire peut aussi se déployer comme un art de la pensée ». Devrait en bénéficier la laïcité de l’avenir et sa si timide prospective incapable de faire face aux graves enjeux.
Donc, prenons le temps d’étudier comment la laïcité s’est engendrée au cours des millénaires de royaumes et d’empires animés par la dynamique d’« association, dissociation » du politique et du religieux (2-4). Ensuite, au cours des siècles d’invention des nations dites modernes, animées par la dynamique d’« association, dissociation » de l’économie et de l’information expérimentale (5-7).
c./ Dans le premier 20e siècle, la laïcité manque sa généralisation. L’appui qu’elle fondait sur le politique dominant vole en éclats dans la grande guerre civile européenne et mondiale aux monstruosités incontrôlées (8). Dans le second 20e siècle, elle la manque encore. En effet, la crainte atomique partagée favorise une guerre froide où l’économie concurrentielle de la Triade (Etats-Unis, Europe et Japon) se déploie et l’emporte. Sans guerre ouverte, elle restreint l’Urss affaiblie à la Russie. Elle conduit la Chine à participer à la dynamique économique mondiale (9). Cette économie auréolée va se libérer comme jamais en économie financière dérégulée. Elle se lance sans limites à la conquête du monde mais se révèle incapable d’éviter en même temps d’abîmer gravement les humains et la nature. Ces échecs de l’économie succédant à ceux du politique et du religieux font que la laïcité ne peut jamais être un remède prêt à l’emploi. Elle est aussi toujours à réinventer dans des situations nouvelles. La laïcité apparaît enfin à la raison non pas comme dirigée pour ou contre telle ou telle activité mais comme exercice général de sauvegarde de l’humain. Et cela contre toute activité dominante, autoritariste, abaissant voir détruisant tout ce qui n’est pas elle (10).
d./ Mais pourquoi cette suite de fourvoiements et renaissances que constitue l’histoire ? Seule une anthropologie approfondie nous en livre les raisons. Elle situe l’être humain dans son lieu et son temps originaires, ceux où la nature lui abandonne la mise en œuvre de lui-même. Néotène, éternel enfant ayant toujours à grandir en relation adaptative à son environnement cosmique infini (11). La laïcité est constamment remise en cause et menacée par l’ambivalence des humains entre la possibilité d’une montée aux miracles et celle d’une descente aux massacres. L’homme, effrayé ou fatigué d’être néotène, cherche, dans l’infini, l’absolu auquel il croit pour exister. Quitte à se le prouver, à tout prix, en devenant meurtrier de l’autre (12). Il est d’autant plus nécessaire de mettre en évidence les processus fondamentaux qui rendent la laïcisation toujours susceptible de réussir ou d’échouer (13). Nécessaire aussi de comprendre comment l’exercice humain antagoniste a inventé les trois figures de l’évolution humaine : conduites, activités, formes de société dont on découvre qu’ensemble elles constituent la transpolitique, terrain et terreau des laïcisations (14-17).
e./ Ces fondamentaux permettent de structurer les études rétrospectives des échecs ou réussites des laïcisations dans les parcours géo-historiques. Comme celles prospectives des échecs et réussites susceptibles d’advenir. Nous évoquerons quelques voies possibles pour des laïcisations des religions et du religieux (18) mais aussi de l’économie (19). Ces grandes activités sont à l’origine des formes de société. Et, celles-ci (tribale, impériale, nationale, mondiale) successivement inventées, ne se sont pas pour autant simplement remplacées. Elles se sont, les unes et les autres, associées à différents niveaux respectifs, selon les multiples circonstances interactives et interférentes. Les sociétés singulières ont ainsi chacune une forme composite fort complexe. La laïcisation des sociétés est donc d’un niveau de difficulté extrême (20).
f./ Pourquoi tout ce travail ? Ne peut-on accéder à l’idée utile simplement en l’énonçant ? Non, c’est une condition sine qua non de passer par l’expérience interactive physique et mentale dans laquelle on découvre et on se découvre, on invente et on s’invente. En raison de ce qui s’y trouve donné de non déjà prévu à savoir justement des « faits, valeurs », rencontrés. On ne peut séparer le parcours et sa conception judicieuse.
C’est la raison pour laquelle nous ne disons pas que la laïcité est un universel. Elle est seulement un universalisant (Jullien : 2011). Les écrivains antillais de langue française ont proposé diversalité, diversalisme pour réguler universalisme. De même pour humanisme, la laïcité, et seulement si elle est mise en œuvre, est humanisante (preuve ou falsification à faire) et non déjà par nature « humaniste ».


Plan des intertitres de l’article de J. D. « L’homme antagoniste (L’universalisant laïque) »

1./ Entre histoire, anthropologie et avenir, le fil rouge laïque
2./ Religion, politique, économie et formes de société avant même l’histoire »
3./ Politique et religieux d’empire : histoire d’un duo de pouvoirs
4./ Inhumaines politiques impériales ; sursauts religieux et philosophiques
5./ Une Europe d’économie et de science appuie les politiques contre la Papauté
6./ Le progrès scientifique et technique et ses antagonismes régulateurs en danger
7./ La laïcité française de 1905 et ses origines
8./ La laïcité de 1905 et le premier 20e siècle
9./ Un second 20e siècle à la grâce de l’économie !
10./ Unification financière et monde tragique de crases au 21e siècle
11. L’homme néotène dans l’infini du monde, des autres et de lui-même
12./ L’homme centré, l’homme absolu, l’homme meurtrier
13./ Les processus fondamentaux de laïcisation : séparation, régulation, articulation
14./ Les 3 figures de l’humain, bases des laïcisations
15./ La première figure : la régulation antagoniste des conduites
16./ L’évolution antagoniste globale : conduites, activités, formes de société
17./ Transpolitique et transititologie : terrain et terreau des laïcisations
18./ Laïciser les religions et le religieux ?
19./ Laïciser l’économie ?
20./ Activités dominantes, sociétés agressives et laïcisation ?
Jacques Demorgon, écrivain - mentions légales - réal. o multimedia